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Transformation numérique et « ville intelligente »

Ces dernières années, la technologie numérique a fortement influencé notre façon de travailler, de voyager, d’échanger, de communiquer et de consommer, dans le contexte d’une mondialisation toujours plus poussée. Les technologies numériques ont la capacité d’augmenter la production économique, d’améliorer les services publics, d’encourager la participation des citoyens et sont utilisées pour aider à relever certains des plus grands défis de la société.

Si les développements technologiques et leurs utilisations sont synonymes de progrès et de gains de productivité, ils peuvent également créer de petites difficultés qui, à défaut d’être étudiées, anticipées et atténuées/minimalisées, peuvent entraîner des effets involontaires, des discriminations, des dommages environnementaux et des inégalités.
Il conviendrait de prendre en considération l’impact environnemental des technologies numériques : les émissions de gaz à effet de serre (GES) des technologies numériques représenteront 6 % de la production mondiale dans 4 ans, soit trois fois celles de l’aviation mondiale1 alors que selon l’Union internationale des télécommunications (Nations unies), les émissions numériques doivent diminuer de 45 % d’ici 2030 pour pouvoir atteindre les objectifs de l’Accord de Paris².

La démocratie pourrait être affectée par la circulation de fausses nouvelles, l’érosion de la place de la politique, remplacée par des décisions fondées sur les automatismes, les algorithmes, l’intelligence artificielle, etc. étant une préoccupation majeure. L’équité sociale et territoriale est remise en cause lorsque l’accès aux services publics n’est pas égal pour tous, mais aussi lorsque les risques éthiques liés au respect des données personnelles et de la liberté individuelle ne sont pas prises en compte, ou lorsque des principes opaques sont mis à profit pour concevoir des outils de décision automatiques.

Le secteur numérique englobe un éventail d’outils et de solutions fondées sur les technologies de l’information et de la communication (TIC) : infrastructure de connexion, logiciels de gestion, applications de téléphonie mobile, systèmes d’information géographique (SIG), SMS, forums en ligne, bases de données urbaines, etc. Il comprend également un écosystème plus large de plateformes de médiation, de places de marché et d’inclusion numérique, de secteurs économiques se structurant autour de la technologie numérique, de secteurs de formation numérique, etc. Le secteur numérique est donc impliqué à la fois dans la production de données et dans le développement de nouveaux services capables d’utiliser ces données.

La capacité d’une autorité locale à utiliser des outils et des données numériques influencera la manière dont elle pourra concevoir des politiques et fournir des services publics. La mise en place d’une infrastructure numérique, de compétences dans ce domaine et de nouvelles manières de travailler est importante pour pouvoir structurer, contrôler et évaluer les projets gouvernementaux de manière radicalement différente. Les villes ne sauraient se contenter d’être de « simples » gardiennes et consommatrices de données par le biais de plateformes privées, elles doivent aussi devenir des stratèges en matière de données, s’appropriant toutes les questions relatives aux données, afin que de véritables choix politiques puissent être faits et ne soient pas laissés à d’autres. Lorsque les données sont bien utilisées pour la prise de décision, leur pouvoir réside dans la manière dont elles sont gérées, structurées, et traitées ; dans le processus décisionnel des algorithmes qui les traitent ; dans la transparence des données et des questions de propriété liés aux modèles adoptés (commerciaux ou autres). Cette capacité influencera également la manière dont les parties prenantes du territoire produiront et fourniront des services innovants : l’autorité locale peut basculer du rôle de créateur à celui de facilitateur et de « moteur ».
La transformation numérique d’une autorité locale ou d’un service urbain, si elle est orientée vers le développement de nouveaux usages numériques pertinents et fructueux au niveau local, peut contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable (SDG) des Nations unies. Plus précisément, l’Objectif 9 : « Bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable qui profite à tous et encourager l’innovation » ; l’Objectif 11 : « Faire en sorte que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables » ; et l’Objectif 17 : « Renforcer les moyens de mise en œuvre et revitaliser le partenariat mondial pour le développement durable ».

Selon l’Union Internationale des Technologies, institution spécialisée des Nations Unies, la contribution des technologies TIC aux ODD s’articule autour de quatre domaines clés : la construction d’infrastructures, la garantie des investissements, la promotion de l’innovation et la garantie de l’inclusion3. Par exemple, la mise en place d’une connexion haut débit peut faciliter l’utilisation de certaines technologies au service d’approches innovantes afin de gérer les villes plus efficacement, tout en améliorant le bien-être des citoyens. En outre, garantir l’inclusion, en développant les compétences numériques au sein de la population ou en favorisant des liens plus étroits entre les citoyens et les autorités locales, peut permettre d’avoir des citoyens mieux informés et plus autonomes ainsi que des politiques plus réactives, plus pertinentes, plus adaptées et plus à l’écoute.

L’influence de la transition numérique sur les ODD est donc transversale, car une infrastructure améliorée et une interaction accrue des parties prenantes avec les institutions publiques sont les fondements essentiels d’un changement qui aura des répercussions sur la société, l’économie et l’environnement en général. Il faut toutefois se rappeler que la transformation numérique n’est pas une fin mais plutôt un moyen de parvenir à un développement urbain durable, car elle n’offre aucune garantie de résultats positifs en matière de développement.

1. https://www.greenit.fr/empreinte-environnementale-du-numerique-mondial/
2. https://www.itu.int/en/mediacentre/Pages/PR04-2020-ICT-industry-to-reduce-greenhouse-gas-emissions-by-45-percent-by-2030.aspx
3. UIT, 2018. Les TIC au service des Objectifs de développement durable des Nations Unies. Consulté à l’adresse suivante : https://www.itu.int/ web/pp-18/fr/backgrounder/6050-icts-to-achieve-the-united-nations-sustainable-development-goal