Share

Compétences numériques

Il est clair que la croissance démographique rapide et l’accès croissant à la technologie numérique offrent de grandes possibilités aux entreprises et aux citoyens africains. Bien que la maturité numérique se développe, des questions demeurent, notamment en ce qui concerne la culture numérique. C’est un facteur fondamental pour le succès d’une ville intelligente qui doit être abordé pour que les villes africaines adoptent la transformation numérique de manière positive. Une ville intelligente ne peut pas progresser sans ses citoyens. L’écosystème numérique des villes africaines étant comparativement peu structuré, la transformation numérique devra également tenir compte de la manière dont les changements peuvent être apportés au niveau des systèmes, par opposition à l’introduction de services isolés qui utilisent la technologie numérique.

 

digital skills

Outre les inégalités géographiques, socioculturelles et économiques qui entraînent un accès restreint à la technologie numérique, le degré de répartition des compétences numériques dans les villes africaines constitue une autre source d’inégalité. Ces compétences numériques impliquent souvent la capacité d’interagir avec du contenu en ligne. Les données d’enquêtes transnationales suggèrent que la « pertinence » – au même titre que la présence d’applications dans la langue principale d’un individu – est le facteur clé de l’adoption de la technologie numérique1.

Chaque ville a des particularités linguistiques qui reflètent le nombre de dialectes présents dans tout le pays. Cela peut se traduire directement par des inégalités numériques si le contenu n’est disponible que dans la langue officielle. Les villes du réseau ASToN ont plu- sieurs langues officielles et non officielles en leur sein, par exemple Kampala, en Ouganda, a deux langues officielles (l’anglais et la swahili) et des dialectes de langues bantoues, nilotiques, soudaniques centrales et kuliak ; Kigali, au Rwanda, a quatre langues officielles (le kinyarwanda, l’anglais, le français et le swahili) alors qu’à Maputo, au Mozambique, le portugais est la langue officielle, de nombreux dialectes et langues bantoues étant utilisés.

À Kampala, la municipalité a lancé un programme de « villes électroniques » en 2014 pour améliorer l’efficacité de la collecte des recettes fiscales. Outre l’utilisation d’un simple outil numérique pour améliorer le recouvrement des impôts, ce système rédigé en anglais a également été complété par des modalités de paiement ad hoc telles que les guichets, les banques, le mobile-banking et les points de vente afin de faciliter l’appropriation de cet outil numérique par les résidents.

« La ville intelligente n’est pas une pile technologique de services intelligents ; elle est bien plus que cela et, sans citoyens numériquement compétents, elle n’a aucun sens.

La pertinence du contenu reflète également d’autres types d’inégalités, telles que celles ressenties par les femmes dans le monde². Par exemple, l’écart entre les hommes et les femmes utilisant internet en Afrique est de 33 % et continue de se creuser3. Les autres facteurs influençant l’utilisation de l’internet mobile, en parti- culier pour les femmes, sont l’accessibilité, l’alphabétisation et les compétences numériques, ainsi que les préoccupations en matière de sûreté et de sécurité4.

« Les autorités locales doivent être conscientes que le développement de solutions numériques peut continuer à défavoriser les individus et les groupes qui sont limités par leur accès à la technologie numérique et leur niveau de culture numérique.

Même si la technologie numérique peut donc générer des inégalités ou accentuer celles déjà existantes, les individus peuvent bénéficier de la technologie numérique sans y avoir accès personnellement. Par exemple, sans posséder de téléphone mobile ou d’ordinateur, les communautés peuvent bénéficier d’une efficacité accrue des services publics et d’un meilleur fonctionne- ment d’une autorité locale qui a développé des solutions numériques5. Il existe ici un potentiel important d’innovation frugale et l’alliance des basses et hautes technologies pourrait permettre à l’Afrique d’être la championne mondiale dans ce domaine.

Le défi à relever pour combler les lacunes en matière d’accès aux technologies numériques et de compétences requises pour s’y engager consiste donc à développer et à structurer des réseaux de médiation numérique, à favoriser les solutions omnicanaux dans les applications de relations avec les citoyens et à encourager la réutilisation des équipements numériques.

1. Bello-Schünemann, J. & Aucoin, C. (2016). “African Urban Futures”. Institut d’études de sécurité. Consulté à l’adresse suivante  : https://issafrica.s3.ama- zonaws.com/site/uploads/af20.pdf
2. Banque mondiale, (2018) Digital Jobs for Youth: Young Women in the Digital Economy. Consulté à l’adresse suivante : http://documents.worldbank.org/curated/ en/503651536154914951/pdf/129757-S4YE-Digital-Jobs-Report.pdf
3. UIT, (2020) Faits et chiffres 2019. Mesurer le développement numérique. Consulté à l’adresse suivante : https://itu.foleon.com/itu/measuring-digital-development/ home/
4. GSM Association, (2019). The Mobile Gender Gap Report 2019. Consulté à l’adresse suivante : https://www.gsma.com/mobilefordevelopment/wp-content/ uploads/2019/03/GSMA-Connected-Women-The-Mobile-Gender-Gap-Report-2019.pdf
5. Banque mondiale, (2016) Digital Dividends. Consulté à l’adresse suivante : http://documents.worldbank.org/curated/en/896971468194972881/ pdf/102725-PUB-Replacement-PUBLIC.pdf