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Benguerir développe l’e-santé et favorise l’employabilité des jeunes


Cet article est le fruit d’une collaboration entre le Journalism and Media Lab (Jamlab), ASToN et le Civic Tech Innovation Network (CTIN).


Patients attendant de pouvoir prendre rendez-vous aux urgences de Benguerir

Ville marocaine de 100 000 habitants, située dans la région centrale du Maroc (à 260 kilomètres de Rabat), Ben Guerir concentre l’une des plus grandes transformations du pays. Grâce aux investissements publics dans le projet urbain de la « Ville verte » et dans son université, l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), cette ville figure désormais sur la carte mondiale de la recherche et de l’innovation.

Cette transformation rapide a permis à la population locale de bénéficier des opportunités numériques grâce à l’amélioration des services publics. En 2019, Ben Guerir a rejoint l’African Smart Town Network (ASToN), un réseau qui rassemble 11 villes africaines souhaitant développer des pratiques numériques de pointe et innovantes afin de créer des villes durables et inclusives. Ce projet vise à aider les villes dans leur transition numérique, grâce à l’apprentissage et au partage entre pairs, sur une période de 3 ans et demi, entre 2019 et 2022. Dans ce cadre, Ben Guerir a choisi de se concentrer sur un programme visant à favoriser « l’engagement citoyen » et à réduire « la fracture numérique » Après plusieurs consultations, l’équipe locale a opté pour le développement d’une solution d’e-santé. Comment la ville peut-elle réduire cette fracture numérique et améliorer l’engagement des citoyens dans le secteur de la santé ? Quelles mesures seront mises en place pour y parvenir ?


Les premiers constats

Ben Guerir est une petite ville traditionnelle qui se positionne comme un pôle d’innovation technologique et d’excellence. Depuis 2009, le développement urbain a provoqué une « fracture sociale entre la “ville verte” et la partie plus ancienne et plus pauvre de la ville, qui offre moins d’opportunités. Le chômage, qui touche les jeunes, s’accompagne également d’une fracture numérique », comme l’explique l’équipe du projet marocain.

La ville de Ben Guerir connaît un taux de chômage de 40 %, de forts niveaux de pauvreté et une tendance à l’émigration vers des centres urbains plus importants, tels que Marrakech. » Désormais, la priorité des décideurs locaux est de combler le fossé socio-économique entre les deux parties de la ville. Ce sont ces constats qui ont permis à Ben Guerir de se mobiliser et de développer des partenariats public-privé au niveau local pour combler la fracture numérique.

Le projet va au-delà de la création d’infrastructures numériques. Comme le souligne l’équipe marocaine, « l’accès au numérique dans la ville ne peut être garanti simplement par l’installation d’équipements numériques ou par une formation spécifique ».

Les équipes responsables de la mise en place de ce projet à Ben Guerir sont conscientes de l’ampleur de la tâche. C’est pourquoi elles sont déterminées à agir de manière globale, en visant deux objectifs : renforcer les compétences numériques de la population et mettre les technologies numériques au service de la participation à l’économie locale. » Les autorités espèrent que ce genre d’initiatives permettra de combler les lacunes en matière de formation et contribuera à améliorer les perspectives professionnelles des jeunes de la ville sur le marché du travail. Le secteur local de la santé a été sélectionné pour ce projet.


Les ambitions d’une application d’e-santé

« Nous avons engagé cette démarche au moment de la pandémie de Covid-19 afin de réfléchir aux solutions que la technologie peut apporter au quotidien des citoyens. Les différents acteurs ont évoqué à plusieurs reprises le domaine de la santé », explique Hajjaj Moussaid, vice-président de la commune de Ben Guerir. L’analyse du domaine de la santé a révélé des difficultés d’accès à ce service de base et des problèmes de communication entre le personnel médical et les patients, ce qui engendre une pression sur l’hôpital public.

Pour répondre à ces besoins, « l’équipe locale a proposé la création d’une application mobile qui facilitera la prise de rendez-vous à l’hôpital et permettra la dématérialisation des dossiers médicaux afin de rendre les consultations plus fluides », indique Mounia Diaa Lahlou, Directrice Développement, Société d’Aménagement et de Développement Vert (SADV), l’entité chargée de mettre en œuvre le projet ASToN au Maroc. Cette solution repose sur un système informatisé de prise de rendez-vous à l’échelle nationale.

La solution d’e-santé améliorera la communication entre l’hôpital et la population locale en envoyant des notifications d’annulation de rendez-vous ou en ouvrant de nouveaux créneaux de consultation. « La mise en œuvre de l’application sera assurée par l’intermédiaire de relais communautaires dans la ville et ses quartiers périphériques. L’objectif est à la fois d’améliorer l’utilisation de l’application et de créer de nouvelles offres d’emplois pour les jeunes de la ville en créant une nouvelle profession de relais communautaires qui aident les utilisateurs », explique Hajjaj Moussaid. Ces relais pourraient être indépendants dans le domaine de la santé et offrir des prestations médicales de base et des conseils pour le suivi des patients.

Ce projet ASToN au Maroc en est actuellement à sa troisième phase. « Une étude est en cours pour collecter autant d’indicateurs et de besoins que possible afin de mettre au point l’application. Par la suite, nous sélectionnerons un prestataire de services techniques par un appel d’offres public. Cette phase nécessitera l’obtention d’une autorisation de la Commission Nationale marocaine de contrôle de protection des Données à caractère Personnel (CNDP) », précise Hajjaj Moussaid.


Les défis du projet

Pour l’équipe marocaine, le projet ASToN a renforcé l’approche participative de la gestion locale : « Nous avons collaboré avec le gouverneur, la SADV, les associations de patients et autres structures locales, ainsi que les autorités sanitaires de la province à l’occasion de plusieurs ateliers. Cette expérience a été très enrichissante pour nous en tant que ville marocaine, car nous avons pu bénéficier du retour d’expérience d’autres villes africaines. ASToN a apporté un soutien technique comprenant des méthodes de travail pour l’intégration d’approches numériques dans la gestion publique », explique Hajjaj Moussaid. Mouna Diaa Lahlou de la SDAV est du même avis : « Cette expérience nous a appris à aborder les problématiques locales avec une grande humilité. Elles nécessitent des solutions simples et numériques, sans gros budgets. Nous devons travailler de manière participative ».


Ecrit par Salaheddine Lemaizi.


Pour en savoir plus sur le projet ASToN, visiter le site internet.